Bel après-midi, ce 6 août 2023, pour naviguer en baie de Saint-Brieuc (Côtes-d’Armor). Juste quelques nuages, une excellente visibilité, un vent de nord/nord-ouest de force 4. La croisière s’annonce bien pour les cinq personnes embarquées sur l’Arvag III, un voilier de 10 mètres. Jusqu’au moment où elles découvrent une voie d’eau dans leur bateau. Mais leurs efforts pour l’évacuer sont vains : l’eau monte toujours plus haut dans la coque.
Sans attendre, l’équipage envoie un message de détresse, à 15 h 38, au centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Corsen, dans lequel il donne sa position, à 5 milles au nord d’Erquy, et signale qu’il fait route au moteur vers la côte.
Le CROSS relaie le message à tous les navires, engage un hélicoptère de la gendarmerie nationale, ainsi que la vedette SNS 201 Côte de Penthièvre et le semi-rigide SNS 644 L’Islet, de la station SNSM d’Erquy.
De son côté, l’Arvag III fait route vers la côte. Mais, dans sa hâte de rentrer au plus vite, il heurte une roche. Son moteur s’arrête. Il dérive et ses occupants déploient leur radeau de sauvetage, où ils doivent se réfugier moins de dix minutes plus tard, car l’étrave1 de leur bateau est déjà sous l’eau ! Un voilier, le Sato, se déroute pour leur venir en aide. Les sauveteurs sont aussi en chemin.
De précieuses minutes gagnées
« Nous repérons de loin l’hélicoptère en vol stationnaire et nous dirigeons vers lui, gagnant ainsi de précieuses minutes pour localiser exactement les requérants et les rejoindre en même temps que la SNS 201, explique Serge Renaut, patron du SNS 644. Leur bateau avait commencé à piquer du nez et ils avaient embarqué dans leur canot de survie, assistés par le plongeur de l’hélicoptère. »
Liberté de manœuvre est alors donnée au Sato et les cinq naufragés embarquent sur le SNS 644.
Une fois à bord, une équipière de l’Arvag III se plaint d’une douleur à une côte. « Nous sommes alors mis en relation avec le médecin du SAMU de coordination médicale, précise le patron. La personne a mal, mais est parfaitement valide et regrette de déranger autant de monde. En fait, c’était justifié : elle avait une côte cassée. »
Double transbordement en pleine mer
Les sauveteurs ne sont pas au bout de leurs peines. Reste à organiser la suite des opérations, avec un maximum d’efficacité pour tenter de sauver aussi le bateau. Contrairement au semi-rigide, la vedette ne peut pas l’accoster sans danger. "Nous décidons donc de transférer les cinq passagers sur la SNS 201, qui pourra les transporter à Erquy pendant qu’un premier bilan sera effectué, et, parallèlement, d’embarquer sa motopompe thermique à bord du semi-rigide pour tenter de maintenir le voilier à flot.", raconte Serge Renaut.
La SNS 201 Côte de Penthièvre repart à Erquy, où les requérants sont pris en charge par les pompiers, qui complètent les bilans médicaux. « La vedette revient alors pour nous prêter main-forte et, éventuellement, remorquer le voilier au cas où nous pourrions l’assécher, poursuit-il. Malheureusement, nous ne pouvons que constater qu’il n’y a plus rien à faire. Le bateau continue à s’enfoncer et cela devient dangereux. »
Dans ces conditions, bien que le mât du bateau dépasse largement le niveau des marées hautes, les sauveteurs balisent l’épave en y accrochant une bouée et transmettent sa position au CROSS Corsen.
« Nous avons récupéré pratiquement tout ce qui flottait : la bouée couronne, la perche d’homme à la mer, des yaourts, des melons et autres victuailles, les coussins des banquettes qui partaient à la dérive et, dans le voilier, une petite sacoche où étaient rangés tous les documents des plaisanciers et une tablette. À la demande du CROSS Corsen, nous sommes restés un petit moment sur place pour vérifier qu’il n’y avait pas d’irisations sur l’eau, donc pas de pollution par le carburant contenu dans le réservoir du bateau », conclut Serge Renaut, soulignant la parfaite coordination entre la SNSM, l’hélicoptère et les pompiers. Fin des opérations à 17 h 27.
Le bateau a été renfloué par des plongeurs courant août, quand les conditions météo et les coefficients de marées étaient favorables. Doté de moyens de flottabilité et remorqué à Erquy par un chalutier, il en est reparti par la route.
1– Pièce qui termine la coque vers l’avant en formant la proue d’un navire.